lundi 5 novembre 2012

La crémation


Mon père avait toujours dit qu'il ne voulait pas, une fois disparu, que les vers le mangent. Il s'imaginait grouillant d'asticots se nourrissant de son corps mort. Il ne cessait de le répéter et nous avons donc respecté son choix. Jusqu'à nouvel ordre, notre corps même sans vie nous appartient et on en fait ce qu'on en veut, préférer une température à 1200° pendant plus d'une heure est préférable pour certains à la décomposition lente. Quand on est mort on est mort que je sache! De-là à évoquer une "violence atroce pratiquée sur le défunt "selon  selon Damien Le Guay, auteur de  autour de la mort en cendres- la crémation aujourd'hui, que faut-il en penser? aux éditions du Cerf, cité dans le Ouest-France, il ne faut rien exagérer.
Cependant l'auteur n'a pas tort quand il évoque les violences faites aux familles qui se plient, dans la sidération, à une destruction des traces, parfois expéditive. Il est important d'y réfléchir au préalable afin de  s'adresser à un centre qui a l'habitude et qui ne  bâcle pas la cérémonie. 
Pour mon père, nous avions conscience de respecter son choix. Il y a plus de 20 ans ce n'était pas l'habitude de se faire brûler et il y avait peu de centres, ces derniers prenaient le temps d'encadrer les familles. Cependant,  n'ayant pas réfléchi, nous n'avions rien organisé pendant la crémation, moment très intime au cours duquel j'ai dû subir la présence d'une personne que je n'avais aucunement envie de voir, une musique lénifiante alors que mon père aurait sûrement aimé le son du cor au fond des bois pendant une chasse à cour, évènement auquel il avait dû assister de loin en forêt de Paimpont quand il était jeune. Lorsque le croque-mort est arrivé avec le seau à cendres, j'avoue avoir été surprise. Ne sachant quoi faire, nous avons accepté n'importe quoi,  celles-ci ont été dispersées dans un endroit sinistre, le long d'un mur glauque d'un jardin des morts attenant au crématorium du Mans. Autant dire que je n'ai jamais remis les pieds dans ce lieu et n'y retournerai jamais ....
Plus de traces, rien, l'anéantissement or, moi, j'aime les cimetières, les croix, les chrysanthèmes, l'idée même qu'on puisse encore parler un jour, au mort qui gît sous la pierre tombale, cette bien-nommée sur laquelle on peut pleurer, mettre la main. J'aime chercher des tombes d'ancêtres que l'on sait reposer dans ces petits villages du fin fond de la Bretagne. 
Peu importe le lieu, mais il est vrai que quelques cyprès, une belle vue sur la mer, des petits cailloux blancs, parfois la présence des morts de la guerre 14-18, de quelques aviateurs, le reflet des différences sociales dans l'architecture des tombes, les messages laissés par la famille, les amis, font des cimetières des lieux exceptionnels de recueillement.
Par conséquent, ce à quoi il est fondamental de réfléchir, c'est quoi faire des cendres? Peu importe le corps, mort il est de toute façon, l'enveloppe charnelle n'est rien mais il est important qu'il reste quelque chose du défunt, au moins un lieu symbolique où le retrouver.
Ainsi, au Saint-Sépulcre on fait la queue pour contempler le tombeau du Christ.
 

2 commentaires:

  1. Et puis maintenant dans les cimetières : http://www.bluewin.ch/fr/index.php/1644,658779/Des_flashcodes_pour_rendre_les_cimetieres_vivants_/fr/multimedia/

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