mardi 29 septembre 2015

Sauve qui peut la vie, Nicole Lapierre.

Chroniques de Bretagne fait sa rentrée littéraire, enfin!  Après plusieurs mois de diète je recommande vivement la lecture de Sauve qui peut la vie de Nicole Lapierre.

L'extrait de quatrième de couverture "dans ma famille on se tuait de mère en fille. Mais c'est fini" ne pouvait que m'attirer, ayant su, très jeune,  le suicide de ma grand-mère paternelle, évènement maintes fois évoqué par ma mère. Certes, dans ma famille,  il n'y eut que cette mort violente, au fusil, coup tiré dans la bouche,  mais je me suis souvent demandée ce qui pouvait pousser une mère à mettre fin à ses jours avec des enfants encore très jeunes. 
Y avait-il une hérédité du suicide? 
Aurais-je moi aussi cette tentation ou ce courage? 
Aujourd'hui, je me demande surtout en quoi ce récit a-t-il marqué ma vie? Il était immanquablement lié à l'infidélité  des hommes puisque la raison officielle, jamais contestée par mon père qui ne disait mot, était que mon grand-père avait pris une maîtresse! 
Ici point de raisons dont je me souvienne à la lecture du livre de Nicole Lapierre, elle n'explique (le sait-on jamais d'ailleurs?) pas vraiment, le geste de ces trois femmes: un accident, la fin de la vie, une dépression mal soignée (cause probable), la souffrance, la maladie, la filiation, l'histoire de la famille émigrée? L'auteur évoque quelques hypothèses sur les raisons possibles de ces morts violentes mais l'intérêt du livre va bien au delà et à biens des égards il est salvateur, et fait partie indéniablement des livres qui peuvent guérir et sauver. J'ai découvert récemment l'existence d'une bibliothérapie!  
Ce  livre est  remarquable à plus d'un titre. Il est bien écrit, sans pathos, chaque phrase sert le propos de manière concise et intelligente. Il fourmille d'idées et de questions tout en restant fondamentalement optimiste. 
Il est ainsi une réflexion sur l'exil dont il est tant question aujourd'hui. Il montre à quel point la fuite est aussi une force, une violence terrible néanmoins utile afin de sauver sa peau. Elle refuse l'identité de victimes qui est celle du malheur et souligne, oh combien, que le psychisme ne se réduit pas au prisme des seules relations parentales mais que l'Histoire y a sa part. (page 242) 
Il est aussi un témoignage sur la Shoah et ses effets sur les descendants de deuxième et troisième génération, il évoque le rôle de la mémoire, et propose une réflexion sur les changements de patronyme.
Et à juste titre, "ce livre est comme une sorte de fortifiant pour résister au mauvais temps présent". 
L'héritage n'a rien d'inéluctable et comme le disait si joliment son père, il s'agit de répondre du tic au tac, évoquant l'horloge qui avance préférable à l'immobilisme. 

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